Instabilités et luxations

Qu’est-ce qu’une luxation, une subluxation, une instabilité de l’épaule ?

Une luxation de l’épaule est une perte de contact entre les surfaces articulaires de la tête de l’humérus et de la glène. Elle nécessite le plus souvent une manœuvre (réalisée par le patient lui-même ou le plus souvent par une tierce personne) pour remettre en place la tête de l’humérus en face de la glène (réduction).

Une subluxation est une perte de contact partielle des 2 surfaces articulaires, l’épaule se remettant alors le plus souvent spontanément en place.

 

L’instabilité de l’épaule est le nom que l’on donne lorsqu’il existe une tendance à la récidive des épisodes de luxation ou de subluxation de l’épaule.

Questions fréquentes

L’instabilité d’épaule peut être soit antérieure, soit postérieure, soit multidirectionnelle. L’instabilité antérieure est la plus fréquente. Elle se produit le plus souvent lors d’un mouvement d’hyper abduction et de rotation externe forcée (position d’armée du bras). Les luxations postérieures sont moins courantes. Dans certains cas, l’instabilité est dite multidirectionnelle car l’épaule se luxe tantôt en avant, tantôt en arrière.

Le déplacement de la tête humérale lors du traumatisme peut induire différentes lésions.

Les lésions les plus fréquentes correspondent à ce que l’on appelle communément « lésions de passage ». Le passage de la tête de l’humérus en avant de la glène peut être à l’origine de lésion à la partie inférieure du labrum, des ligaments ou de la capsule. Les autres lésions de l’épaule fréquemment observées sont une érosion de la glène ou une encoche de la tête humérale.

Les tendons de la coiffe des rotateurs peuvent être lésés par étirement. Cette complication est particulièrement fréquente après 45 ans. Il est également possible d’observer des lésions du tendon de longue portion du biceps. Ces lésions surviennent alors volontiers en regard de son insertion sur la glène. Le biceps emporte alors avec lui le labrum (ou bourrelet glénoïdien) : on parle de « SLAP lesion » (Superior labral anterior to posterior lesion).

Parfois, la luxation de l’épaule peut être associée à une fracture de l’extrémité proximale de l’humérus.

Les complications neurologiques concernent le plus souvent le nerf axillaire (qui contrôle notamment le muscle deltoïde). Les autres complications neurologiques ainsi que les complications vasculaires sont exceptionnelles.

Lorsqu’une luxation d’épaule se produit, un certain nombre de structures anatomiques peuvent être lésées. Ces lésions sont appelées  « lésions de passage ». Il peut s’agir de lésions osseuses comme une fracture de la glène ou une impaction de la tête humérale (encoche de Malgaigne). Les lésions peuvent également concerner la capsule articulaire, le bourrelet (lésion de Bankart) ou les ligaments.

Ces lésions de passage favorisent la survenue de nouvelles luxations. Les récidives de luxations elles-mêmes aggravent ces lésions de passage. Ainsi, en l’absence de cicatrisation des structures ligamentaires, capsulaires ou osseuses à la suite d’un premier épisode de luxation, les accidents d’instabilité ont tendance à être de plus en plus fréquents et à survenir pour des traumatismes de moins en moins importants.

A plus long terme, l’instabilité de l’épaule est à l’origine de lésions cartilagineuses. Cette arthrose peut alors  être responsable d’une raideur et de douleurs en l’absence de luxation.

En dehors des épisodes de luxation, il est fréquent de présenter une gêne ou des douleurs. Ces symptômes surviennent alors le plus souvent en position dite de « l’armé » de l’épaule. Il s’agit de la position dans laquelle les luxations ont tendance à se reproduire. On parle d’appréhension lorsque les patients ont le sentiment désagréable que l’épaule va se reluxer. Parfois, il peut s’agir d‘une simple douleur.

La présence de douleurs survenant dans une autre position doit faire rechercher une lésion associée. Il faut alors rechercher en particulier une lésion de la coiffe des rotateurs ou du tendon de la longue portion du biceps

Le diagnostic d’instabilité d’épaule est évident lorsque le patient a présenté une ou plusieurs luxations et qu’il est gêné ou présente des douleurs lors en position de « l’armé » du bras. Parfois, il s’agit de subluxation sans réel épisode de luxation. Les éléments orientant vers ce diagnostic sont alors le terrain du patient (jeune âge, sport à risques, hyperlaxité), l’examen clinique (manœuvre d’appréhension positive) ainsi que la présence de lésions de passage sur les examens complémentaires (radiographie, arthroscanner ou arthrioIRM).

Après la première luxation, la chirurgie n’est pas systématique. Il est en revanche impératif d’immobiliser strictement l’épaule pour une durée minimale de 3 semaines. Le but est de faire cicatriser les lésions de la capsule, des ligaments et/ou du bourrelet glénoïdien. Le taux de récidive de la luxation de l’épaule est alors d’environ 50%.

En cas de récidive, cela signifie que les lésions n’ont pas cicatrisées. La rééducation ne peut alors pas à elle seule stabiliser l’épaule et la chirurgie doit alors être envisagé. Différentes interventions chirurgicales peuvent être réalisées pour stabiliser l’épaule. Le choix se fait selon le terrain du patient mais aussi en fonction des lésions associées (en particulier les lésions de passage). Selon les cas, il est possible de réaliser :

Une butée d’épaule : le principe de cette intervention repose sur la mise en place d’une butée osseuse à la partie antérieure de l’épaule pour éviter la luxation de l’articulation. On sectionne pour cela l’apophyse coracoïde que l’on vient ensuite fixer à la partie antérieure de l’articulation. Les tendons qui y sont accrochés permettent également de réaliser une sorte de hamac qui augmente encore la stabilité de l’épaule. Cette intervention est classiquement réalisée par une courte incision antérieure. Des techniques utilisant l’arthroscopie sont actuellement en cours de développement. Elles n’ont aujourd’hui pas montré leur supériorité par rapport aux techniques conventionnelles.

Une intervention de Bankart : il s’agit de réparer sous arthroscopie les lésions de la capsule, des ligaments et du bourrelet glénoïdien au moyen d’ancres qui sont fixées à la partie antérieure de la glène.

Un remplissage : Le principe de l’intervention est de combler l’encoche de la tête humérale afin que cette dernière ne vienne plus « s’accrocher » sur le bord antérieur de la glène lorsque le patient positionne son épaule en position de « l’armé ». On utilise pour cela des ancres qui permettent de plaquer le muscle sous épineux dans l’encoche.

Le traitement des luxations postérieures répond aux mêmes principes : selon les cas, il est possible de réparer la capsule et les ligaments ou de mettre en place une butée osseuse (prélevée sur l’os iliaque dans ce cas au niveau du bassin).

Selon le geste chirurgical envisagé, la prise en charge se fait en chirurgie ambulatoire.

Un anesthésie logo-régionale est réalisée avant l’intervention afin de contrôler les douleurs pendant l’intervention et en post-opératoire.

Les suites de la chirurgie dépendent évidemment du type de geste réalisé. Cependant, il faut dans tous les cas protéger l’épaule par une attelle afin de permettre aux tissus de cicatriser. La rééducation est commencée  dès la sortie de la clinique afin de récupérer au plus vite les amplitudes articulaires. Il faudra néanmoins être vigilant à ne pas réaliser une rééducation trop intensive afin de permettre aux structures osseuses et ligamentaires de cicatriser amis également afin d’éviter l’apparition de phénomènes inflammatoires douloureux.

L’instabilité de l’épaule est aujourd’hui une des pathologies les plus fréquemment prise en charge chirurgicalement. Cependant, un certain nombre de complications sont décrites. 

Le risque le plus fréquent est l’apparition d’une raideur post-chirurgicale de l’épaule. Cela explique l’importance de la mise en place d’une rééducation post-opératoire de qualité.

La récidive de la luxation de l’épaule signant l’échec de la chirurgie ne dépasse pas 5% des cas. Il peut parfois arriver que le patient présente  toujours dans les suites de l’intervention en inconfort dans certaines positions  sans récidive des luxations. La plupart des patients sont cependant entièrement satisfaits et strictement asymptomatiques après la chirurgie.

Les complications les plus redoutées sont les complications neurologiques. Elles sont heureusement relativement rares.

Les autres complications  relatives à toute chirurgie telles que les complications de l’anesthésie, l’infection, les lésions vasculaires sont rarissimes.

La majorité des patients présentant une instabilité d’épaule sont jeunes et sportifs. La reprise des activités sportives est naturellement un des principaux objectifs de la chirurgie. La reprise des activités sportives peut être envisagée quel que soit l’activité. Elle ne doit en revanche pas se faire avant la récupération complète de la souplesse de l’épaule. Concernant, les sports à risque (sport contact et armé contré), il est nécessaire d’attendre au moins 6 mois avant cette reprise afin que l’ensemble des structures anatomiques ait le temps d’entièrement cicatriser.

à retenir

Docteur Numa Mercier